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Le rêve d'un rêve, Chapitre 2: Le Baisabrok

  • StanislasMleski
  • 28 avr. 2022
  • 11 min de lecture



Odin avait attendu la nuit pour entrer discrètement à Asgard. Il ne voulait parler à personne des négociations sans en avoir discuté avec Frigg son épouse qu’il rejoignit immédiatement dans son palais de Fensaslir qui était accolé au palais royal.

Elle était non seulement sa femme mais aussi sa principale conseillère dont la clairvoyance lui avait évité bien des erreurs. Elle incarnait l’amour conjugal et la fidélité.

Elle l’accueillit avec un sourire et lui demanda si son entreprise avait abouti.

Odin lui rapporta les discussions en détail et Frigg rendit sa sentence :


- Tu as réglé un problème mais tu en as créé d’autres.

- Lesquels demanda Odin surpris

- La sélection des 80 000 élus et le privilège accordé aux guerrières de choisir leurs partenaires.

- Tu as raison, je vais y réfléchir et j’annoncerai ma décision demain matin dans l’arène.


La nouvelle du retour s’était répandue dans tout Asgard et les guerriers s’ étaient réunis dès l’aube dans la plaine sous les fenêtres d’Odin.

Celui-ci était apparu à la fenêtre équipé de son armure qui scintillait sous les rayons du soleil levant. Un silence glacial régnait sur la plaine qui n’était troublé que par le bruit d’une tempête de neige .


Le maître des lieux respira profondément avant de s’exclamer :


- Freya a accepté de nous rendre visite avec ses guerrières une fois par semaine !

Un tonnerre d’applaudissements suivit sa déclaration qu’il tempéra en étendant les bras pour réclamer le calme afin d'énoncer les conditions fixées par la déesse.

Les guerriers qui n’étaient pas des intellectuels réfléchirent pendant quelques secondes avant de réaliser que la plus grande partie d’entre eux serait exclue des festivités ce qui suscita une explosion de colère d’une telle violence qu’elle fit trembler la muraille de l’arène.


Odin attendit la fin du brouhaha pour s’expliquer :


- Nous n’avons pas le choix car les guerrières de Freya ne sont que 40 000 et ont eu l’amabilité d’accepter deux amants par soirée .

Il fut interrompu par les vociférations d’Eric à la hache sanglante :

- Depuis quand les femmes décident-elles du choix de leurs amants ainsi que leur nombre ? Tu oublies nos traditions que tu es chargé de faire respecter. Emparons nous d’elles et violons les tous ensemble comme nous le faisions quand nous ramenions des esclaves dans nos villages au fond du fjord !



Sa harangue fut accueillie triomphalement par ses camarades mais Odin n’était pas d’humeur à se laisser faire par ce trublion :


- Ta langue est aussi longue que ton cerveau est minuscule. je te rappelle que les filles de Freya sont toutes des combattantes mortes en héroïnes sur les champs de bataille et pas des esclaves craintives . Elles sont sous la protection de leur déesse qui siège au conseil des grands dieux.et se tiendront à nos côtés le jour du dernier combat. C’est le rôle que l’histoire leur a assigné et que toi, vulgaire fratricide sanguinaire, voudrait modifier en défiant les dieux .

Le discours d’Odin avait produit son effet et les guerriers huèrent Eric, effrayés d’avoir provoqué les dieux. Il exposa alors l’organisation prévue :


- Le baisabrok aurait lieu une fois par semaine, le vendredi.

- Les 80 000 élus seront les survivants du combat du vendredi ce qui vous motivera à vous entraîner.

Les guerriers acceptèrent cette solution équitable et se précipitèrent à l’armurerie pour récupérer leurs armes et reprendre immédiatement leur exercice mais Odin les rappela ;


- N'oubliez pas de préparer vos préservatifs en boyau de sanglier.


Tout le peuple d’Asgard était mobilisé par la préparation du premier baisabrok de l’histoire. Frigg avait pris en main l’organisation de la fête. Elle avait prévu un cocktail d’Hydromel dans la plaine pour permettre aux futurs amants de se découvrir et de se choisir et avait aménagé dans l’immense salle des festins des cellules de trois convives meublées d’un canapé et de deux fauteuils pour favoriser les préliminaires. Elle avait aussi demandé à Andhrimnir, le cuisinier des dieux ,de varier le menu en préparant des terrines de sanglier et de parfumer le ragoût de viande avec des baies parfumées qui poussaient sur les pentes du walhalla ce que celui ci accepta de mauvaise grâce.

Mais le problème le plus épineux fut celui de la fabrication des préservatifs. Freya avait bien précisé que c’était une condition impérative de la réalisation de la fête ajoutant que chaque élu devait en porter deux autour du cou sous peine d’être exclu des festivités.

Andhrimir avait refusé de les fabriquer en prétextant qu’il était cuisinier royal et certainement pas gérant de sex shop. Tout juste avait-il accepté sous la pression de Frigg de prélever les boyaux du sanglier qu’il utilisait habituellement pour la confection des saucisses.


Mais les guerriers n’avaient jamais fabriqué de préservatifs et leurs tentatives échouèrent. Les boyaux étaient soit trop gros soit trop étroits, délicats à manier et surtout sans fond. Le baisabrock était prévu dans quelques jours et semblait compromis.

La situation fut sauvée par Frigg qui exigea d’Andhrimir qu’il dévoilât sa méthode de réalisation des saucisses.

Dès le lendemain matin, l'arène était remplie de guerriers qui avaient délaissé leurs armes pour une ardoise et une craie pour de noter scrupuleusement les conseils du cuisinier royal.

Andhrimir s’était installé en haut des gradins de l’arène avec son étal, ses couteaux et de la tripe de sanglier et avait commencé sa leçon :


- Il faut d’abord laver les boyaux avec soin à l’eau claire si vous voulez éviter une mauvaise surprise à votre partenaire.

- Ensuite vous coupez le boyau à la longueur que vous voulez donner à votre saucisse.

Cette instruction suscita bien entendu un éclat de rire généralisé que le cuisinier royal calma d’un froncement de sourcils réprobateur avant de poursuivre :

- Vous ouvrez le boyau à plat et vous le découpez en fonction de l’épaisseur recherchée, vous étalez la chair à saucisse, vous le repliez, vous entourez d’une ficelle alimentaire et vous plongez l’ensemble dans de l’eau bouillante pendant quelques minutes ce qui permet de souder les chairs. Vous retirez la ficelle et vous avez une superbe wurtz prête à être consommée.


Sa conclusion laissa tout le monde stupéfait et des voix de nombreux guerriers s’élevèrent pour proclamer l’impossibilité de tremper leur sexe dans de l’eau bouillante.

Cette réflexion plongea le cuisinier royal au comble de l’exaspération qui hurla qu’on lui avait demandé d’expliquer la fabrication des saucisses et pas celle des préservatifs. De rage il donna un coup de pied dans son étal qui dévala les gradins et il quitta l’arène en furie .

Un silence dépité écrasa les espoirs des guerriers dont le rêve s’envolait lorsqu’un roitelet inconnu du village de Töis situé au fond de l’Islande s’exclama :


- J’ai trouvé la solution : que chacun sculpte son sexe dans une planche de bois et l’entoure de boyau pour le plonger dans de l’eau bouillante et le retirer du moule une fois qu’il sera refroidi !

Il avait sauvé le baisabrok et fut remercié en triomphe. Depuis ce jour il est entré dans l’histoire comme l’inventeur du Sex Toys !


Chacun passa une après midi studieuse en taillant un moule et en confectionnant ensuite les deux préservatifs individuels indispensables au festin sexuel. Le repas fut aussi gai que s’ils avaient tous gagné des combats épiques. Chacun se coucha heureux et ivre mort. Mais le lendemain matin les einherjars étaient à nouveau regroupés dans la plaine en brandissant piteusement des préservatifs desséchés et déchirés. Ils se les montraient sans avoir besoin de parler tant ils étaient désespérés. Le baisabrok ne pourrait pas de dérouler

C’est le roi de Norvège, Harald à la belle chevelure qui trouva la solution :


- La fabrication doit être effectuée la veille de la rencontre pour que le boyau garde sa fraîcheur et surtout il faut l’enduire de graisse de sanglier pour préserver sa souplesse et son élasticité


La veille de l’évènement les walkyries avaient demandé à Odin l’autorisation de participer à la fête sexuelle car elles ne supportaient plus leur existence de chasteté. Elles étaient soutenues par Frigg qui rappela leur importance primordiale et le dieu, dépassé par les évènements de ces derniers jours accepta cette nouvelle transgression de la Loi..

Il fit cependant observer qu’il n’avait pas remarqué la présence de ses deux walkyries préférées, Brunnehilde et Gudrun. Frigg lui répondit qu’elle les avait envoyées en mission et qu’elle lui en parlerait plus tard

Le jour prévu était une de ces belles journées de l’été scandinave éclairée par un tendre soleil qui n’avait pas envie de se coucher . Elles étaient arrivées comme un rêve, une armée de séductrices blondes habillées de leur fourrure sanglée par la ceinture qui portait leurs armes . Elles marchaient en cadence et en ordre de bataille précédées par Freya en fourrure blanche et coiffée de son casque d’or.



Les portes d’Asgard s’ouvrirent et l’armée des héroïnes se dirigea sans s'arrêter vers l’arène où les attendait les 80 000 survivants du combat de sélection de la journée arborant chacun leurs deux préservatifs en collier.

Frigg les accueillit dans la loge présidentielle pour leur proposer de partager les cocktails de bienvenue destinés à faciliter les rapprochements entre les futurs amants mais Freya la remercia poliment et prit la direction des opérations.

Elle ordonna à son armée de prendre place au garde à vous sur les gradins de l’arène qui surplombaient la plaine occupée par les guerriers puis d’un signe leur demanda d’enlever leur ceinture et de laisser glisser leur manteau. En quelques secondes 40 000 femmes se trouvèrent nues prêtes à fondre sur leurs proies sexuelles. Des cris d’allégresse émanèrent de la plaine mais Freya qui s’était emparée d’un mégaphone les calma :


- Maintenant vous allez vous déshabiller et danser sur un air que nous chanterons ce qui nous permettra de vous observer et de choisir nos friandises.

La grosse voix d’un géant roux s’éleva pour l’interrompre :


- Pour qui nous prends tu, nous sommes des combattants et pas des Chippendales !

Freya répliqua immédiatement :

- Nous organisons la fête comme nous l’entendons. Dans le cas contraire nous repartons.

Et ses guerrières refermèrent leur manteau sur un seul signe de leur déesse.

Un immense « non nous sommes d’accord » jaillit de la plaine en même temps que le crétin roux était assommé d’un coup de masse sur le crâne.

Freya sourit et reprit le mégaphone :


- Maintenant déshabillez-vous et dansez en suivant nos mouvements.

Les 40 000 entonnèrent le boléro de Ravel en accompagnant le rythme de la mélodie par des mouvements lascifs et suggestifs des hanches immédiatement imités par les hommes de la plaine.

Ce prélude amoureux embrasa les libidos des fêtards et en particulier celle des guerriers qui avaient du mal à dissimuler leur émotion. 80 000 sexes en érection s’offraient à celles qui voulaient en profiter .

Sans attendre la fin du dernier refrain Freya qui n’était pas la moins excitée donna le signal du départ et ses guerrières dévalèrent les gradins pour se précipiter sur leur gourmandise.

En quelques secondes les amoureux frustrés par plusieurs siècles de chasteté s’emmêlèrent dans une danse amoureuse furieuse et passionnée. Seule Lagertha était restée au bord de l’arène scrutant la mêlée pour y trouver son Ragnar qui était resté l’amour de sa vie malgré ses infidélités . Elle le repéra au milieu de la plaine déjà en train de s’ébattre avec deux beautés.

Elle descendit dans l’arène et les couples s’écartèrent spontanément pour laisser passer respectueusement la légende qui se dirigeait vers son incorrigible amant. Elle était d’une incroyable beauté décorée par les cicatrices qui lacéraient son corps et son visage. Elle avançait lentement d’une démarche royale bientôt suivie par ses admirateurs curieux de connaître le dénouement de la rencontre, dix siècles plus tard, du plus prestigieux guerrier de l’histoire et de la légendaire Lagertha. Mais la scène fut d’une émouvante simplicité.



Elle arriva près de Ragnar et déclara aux deux beautés qui s’occupaient de lui :

- Celui là est à moi !

Elles reconnurent Lagertha et s’éclipsèrent immédiatement. Elle se pencha sur lui pour l’embrasser, le gifla pour son infidélité et reprit la place abandonnée pour jouer avec ses hanches la chevauchée des walkyries sous les applaudissements de la foule ravie d’assister à cet heureux dénouement.

Le baisabrok se poursuivit jusqu’à ce que l’aube glacial n’invite les amoureux repus de caresses à regagner leur forteresse réciproque.

Freya remercia Frigg de son accueil tout en lui suggérant de parfumer avec de la menthe les préservatifs en boyau de sanglier qui laissaient un mauvais goût dans la bouche.

Une certaine sérénité régnait désormais à Asgard mais Odin était de plus en plus morose car il était persuadé que son armée serait défaite le jour de la bataille apocalyptique. Ses guerriers étaient archaïques et avaient perdu de vue leur mission sacrée, désormais obnubilés par le baisabrok du vendredi. Il passait des journées entières assis à côté de Frigg sur le trône magique Hlidskialf qui permet d’apercevoir l’univers. Le temps du ragnarok s’approchait avec des raz de marée, des dérèglements climatiques et deux guerres mondiales rapprochées. Le soleil se coucherait bientôt sur le crépuscule des dieux si aucun remède n’était découvert.

Chacun était perdu dans ses sombres pensées quand les deux walkyries apparurent à l’horizon dans leurs traîneaux tirés par des loups géants. Odin se tourna vers Frigg et lui demanda de lui expliquer quelle était cette mystérieuse mission dont elle avait chargées :


- Je suis aussi pessimiste que toi sur la capacité de notre armée à résister aux forces du mal qui nous attaqueront le jour du dernier combat et j’ai pris l’initiative de leur demander d’explorer l’histoire et le monde pour découvrir de nouveaux combattants et de nouvelles armes plus efficaces que nos javelots, nos haches et nos couteaux.

Odin admit qu’elle avait eu raison.

Brunnehilde et Gudrun avaient bondi de leur char pour se précipiter vers la salle royale. Odin coupa court aux salutations d’usage :


- Qu’avez vous découvert ?

Brunnehilde encore essoufflée prit la parole :

- Nous avons parcouru l’histoire des deux dernières guerres mondiales et pouvons affirmer que les guerres se gagnent grâce à la supériorité technologique !

Odin et sa femme firent un geste signifiant leur incompréhension et Gudrun tenta de leur expliquer :

- En fait, les armes détruisent plus d’adversaires que les guerriers. Les différentes armées ont inventé des canons qui déciment les combattants à distance.

Comme les dieux ne comprenaient toujours pas Gudrun utilisa une métaphore :

- Un canon c’est un peu comme le marteau de Thor en plus puissant, en plus rapide et multiplié par des milliers d’exemplaires.

- Mais c’est exactement ce qu’il nous faut s’exclama Odin en bondissant de son trône

Mais son enthousiasme fut douché par la réponse de la walkyrie :

- Mais nous n’y arriverons pas car il faut une organisation industrielle pour les fabriquer : des mineurs pour extraire le minerai de fer, des usines pour le transformer en acier et le fondre en canons, des ingénieurs pour créer la poudre et un patron pour tout organiser ce qui correspond à une centaine de milliers de personnes.

Elle s’arrêta quelques secondes :

- Et le walhalla est complet......

Profitant du désespoir d’Odin elle ajouta :

- De toute façon, notre armée n’est composée que de bandits de village sans vision stratégique et militaire.

Les dieux savaient qu’elle avait raison mais que faire ?

Brunnehilde osa prononcer la phrase que personne ne voulait formuler :

- Il faut épurer le walhalla si vous voulez vous doter d’une force capable de résister aux attaques maléfiques des géants de glace.

Odin et Frigg s’étaient levés pour signifier la fin de l’entretien mais Brunnehilde avait gardé le meilleur pour la fin :


- Les humains ont découvert l’arme fatale capable de détruire en une seule fois tous les ennemis de l’apocalypse !

- Les deux dieux retombèrent les bras ballants sur leur trône

- Cette arme est la bombe atomique

- Quoi ! s’exclama le maître d’Asgard

- C’est une bombe capable de détruire un pays mais je te préviens tout de suite que nous ne possédons pas la capacité technologique pour la construire qui nécessite des usines gigantesques et des armées d’ingénieurs.

- Mais alors nous n’avons plus de solutions se lamenta Odin

- Il en reste peut-être une répondit la Walkyrie. J’ai appris qu’un professeur de l’université californienne de Stanford avait entrepris des recherches sur la simplification de la fabrication de l’arme et sur sa miniaturisation. Ses collègues prétendent qu’il y serait sans doute arrivé et qu’il aurait créé une arme atomique propulsable avec un simple bazooka

- Un bazooka ? répéta Odin qui ne comprenait pas

- C’est un peu comme un gros bâton

- Mais je le veux, vous vous rendez sur cette terre, vous le retrouvez, vous le tuez et vous transportez son âme au walhalla !

- Il y a un problème, reprit la walkyrie

- Quoi encore ! demanda Odin effondré de sentir sa solution s’évanouir

- Il a disparu. Il serait mort dans un accident de voiture mais les services secrets de son pays sont sceptiques et le recherchent. J’ai fouillé son appartement et j’y ai trouvé un catalogue des spots de surf du sud du Portugal. J’ai l’intuition qu’il est dans ce pays s’il est vivant.


Après quelques instants de réflexion Odin se releva et retrouva sa superbe :


- J’ai pris ma décision, vous partez demain et vous me le ramenez s’il est toujours vivant.

Les deux walkyries se levèrent pour s’éclipser mais Frigg toujours bienveillante leur glissa :


- Il y a un baisabrok ce soir, voulez-vous y participer ?

La réponse de Brunnehilde fut cinglante ;


- Non, car nous n’avons pas envie de nous faire baiser par des porcs qui sentent la graisse de sanglier.

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